« Il faut renoncer définitivement à des objectifs chiffrés de dette et de déficit rapportés au PIB », c’est le titre de cet article du Monde ici qui devrait faire débat… mais comme tout le monde se fiche de presque tout désormais et que l’on peut expliquer sans sourciller que si vous en avez envie, vous pouvez vous sentir licorne à tête bleue ou « flaque de couleur », on peut effectivement dire désormais, qu’il ne sert plus à rien de quantifier la dette, qu’il faut renoncer à des objectifs chiffrés de dettes.

« Dans une tribune au « Monde », l’économiste Nicolas Dufrêne appelle à tirer les leçons de la réussite du « quoi qu’il en coûte » pour rompre avec les règles budgétaires strictes héritées du passé.
En matière de dette publique, la révolution n’est pas pour demain. On aurait pu penser que les séquences du quantitative easing, c’est-à-dire la création de monnaie en contrepartie de l’achat de titres publics, puis du « quoi qu’il en coûte » pandémique allaient enfin nous libérer d’un certain nombre de croyances néfastes sur ce sujet.

Depuis que François Fillon, alors premier ministre, déclarait en 2007 être à la tête d’un Etat en « quasi-faillite », notre dette a quasiment doublé. Elle représentait alors 63 % du produit intérieur brut (PIB) contre près de 115 % aujourd’hui. Et, pourtant, l’Etat a, jusqu’en 2023, emprunté à des taux toujours plus faibles, sans jamais manquer d’acheteurs !

Il a aussi été démontré qu’une banque centrale a la capacité, si elle le décide, de contrôler le niveau des taux et de fournir des débouchés à la dette publique, jusqu’à en posséder plus du tiers pour l’ensemble des pays de la zone euro. Cette situation n’avait pas été prévue par les rédacteurs du traité de Maastricht, qui avaient au contraire tout fait pour l’empêcher. Mais nécessité fait toujours loi. La nécessité de relancer la croissance, d’éviter l’éclatement de la zone euro et de lutter contre la pandémie de Covid-19 a justifié ces politiques dérogatoires.

Il existe pourtant aujourd’hui une volonté très nette de refermer la parenthèse plutôt que de prendre acte de cette nouvelle donne, alors même que les motifs d’investir plus d’argent public sont nombreux : financer la reconstruction écologique, moderniser nos infrastructures, renforcer le système social et éducatif, etc. Il faut au moins 36 milliards d’euros d’investissements annuels supplémentaires pour atteindre la neutralité carbone en 2050. »

Alors effectivement, une banque centrale peut faire ce qu’elle veut dans la limite tout de même de la confiance de ses partenaires, clients comme fournisseurs, qui généralement n’aiment pas être payés en monnaie de singe.

Mais il y a un énorme trou dans la raquette intellectuelle de la thèse défendue dans cet article du Monde.

Si la banque centrale peut en théorie beaucoup, encore faudrait-il déjà avoir une banque centrale.

Or, depuis quelques décennies maintenant, il n’y a plus de Banque centrale française, mais bien une Banque centrale européenne, et la France n’y fait pas du tout ce qu’elle veut, la BCE étant un poil plus allemande que française dans sa politique, dans ses statuts et aussi dans l’exercice de son mandat.

Alors soyons sérieux.

Nous pouvons monter les dettes à des niveaux très élevés, bien plus que ce que l’on pouvait imaginer en utilisant des taux bas et des mesures pas toujours sympathiques pour forcer un peu l’utilisation du dollar par exemple par d’autres pays, mais tout excès finit par atteindre ses propres limites.

Charles SANNAT

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